Les carrières tout entières dans une même entreprise, c’est fini ! Et ce que l’on observe aujourd’hui, c’est que de plus en plus de personnes ne se contentent pas d’accumuler des expériences dans plusieurs entreprises en tant que salariées, mais osent franchir le pas de la création d’entreprise. Et parfois, entre deux activités, on peut passer par la case chômage.
Alors, est-ce une opportunité ? Comment faire de la période de chômage un atout pour réussir son projet entrepreneurial ? Et surtout, quelles sont les erreurs à éviter ?
Quel est le lien entre le chômage et la création d’entreprise ?
C’est bien connu, il n’est pas possible de cotiser au chômage en tant qu’indépendant. Cela dit, un dispositif a été mis en place en 2019 pour indemniser les travailleurs indépendants qui cessent leur activité soit dans le cadre d’une liquidation ou d’un redressement judiciaire, soit parce que l’activité n’était pas viable économiquement. Il s’agit de l’allocation des travailleurs indépendants (ATI), qui est bien sûr soumise à certaines conditions.
En dehors de ce cas particulier, quand on parle d’indemnisation pour la perte d’une activité, on fait plutôt référence au salarié qui a droit à l’aide au retour à l’emploi (ARE) – que l’on continue d’appeler couramment l’allocation chômage.
En pratique, il peut s’agir de plusieurs contextes :
- Un départ en rupture conventionnelle,
- Le dispositif de démission-reconversion,
- Un licenciement,
- Une démission pour motif légitime.
Cela peut donc pleinement faire partie du projet dans une démarche d’optimisation et pour se laisser le temps de développer l’activité tout en se sécurisant financièrement.
Maintenant, la question se pose une fois que l’activité indépendante a réellement démarré et commence à générer des revenus : comment articuler le chômage avec la création d’entreprise ?
Peut-on cumuler l’allocation chômage et les revenus d’un travailleur indépendant ?
La réponse est oui. D’une façon générale, on peut considérer que l’indemnisation en tant que demandeur d’emploi est cumulable avec les revenus de l’activité indépendante. Il existe plusieurs mécanismes pour encadrer ce cumul.
La principale question ici, c’est de savoir si tu as créé ton entreprise avant ou après la perte d’emploi :
- Si ton entreprise existait déjà (avec des revenus) au moment où tu es devenu demandeur d’emploi, alors tu es dans le cas d’une activité conservée et on ne prendra pas en compte ces revenus indépendants pour déterminer le montant d’allocation à te verser chaque mois.
- Si au contraire tu as créé ton entreprise après la perte d’emploi, le montant d’allocation chômage que tu percevras chaque mois sera plafonné pour tenir compte de tes revenus d’indépendants. Le calcul est détaillé dans l’article sur le choix entre maintien de l’allocation chômage et versement de l’allocation sous forme de capital (ARCE).
Comment peut-on optimiser l’allocation chômage avec un projet de création d’entreprise ?
À partir du moment où tu as un projet de création d’entreprise, tu dois te poser certaines questions si tu sais que tu vas potentiellement bénéficier de l’aide au retour à l’emploi.
Quand créer ton entreprise ?
C’est une question déjà abordée maintes fois, et vraiment essentielle dans ce type de situation. La date de démarrage effectif de ton entreprise, c’est ce qui déterminera le montant d’allocation qui te sera versé chaque mois.
Certes, cela n’a en principe aucun impact sur le montant global de tes droits puisque si le montant du versement mensuel est plafonné, alors le montant que tu n’as pas perçu est reporté et viendra prolonger tes droits.
Mais en réalité, l’impact est réel et même conséquent dans certains cas : si tes revenus sont trop élevés par rapport à tes droits mensuels, ils peuvent être reportés de mois en mois… Et que tu ne les perçoives jamais. Alors, dans ce cas, c’est une bonne nouvelle dans le sens où cela signifie que ton entreprise génère un chiffre d’affaires suffisamment élevé. Mais si tu as prévu ton projet en tenant compte de l’allocation chômage et qu’elle n’arrive jamais, cela peut changer la donne.
Les aides accessibles pour certains créateurs d’entreprise
Aussi, on en parle peu, mais il existe l’ARCE (aide à la reprise ou création d’entreprise), un dispositif qui permet de percevoir 60 % du montant total des droits sous forme de capital. Dans ce cas, les éventuels revenus générés par la micro-entreprise importent peu.
Attention à ne pas confondre ARCE et ACRE. L’ACRE, c’est une réduction de cotisations sociales dont bénéficient certains créateurs d’entreprise pendant les 4 premiers trimestres civils d’activité, donc plus ou moins pendant la 1e année d’existence de l’entreprise.
Il y a tout de même des liens entre les deux aides. D’abord, par rapport au chômage : être demandeur d’emploi indemnisé est le principal moyen de bénéficier de l’ACRE. Pense tout de même à consulter la liste des critères, car tu peux être concerné par un autre motif.
Aussi, l’ARCE est réservée aux bénéficiaires de l’ARCE qui en font la demande. Donc, il s’agit d’un vrai prérequis, et c’est une donnée supplémentaire à prendre en compte dans ses choix stratégiques.
Quel statut juridique choisir ?
J’aime la paperasse se consacre principalement aux autoentrepreneurs, et il faut reconnaître que c’est le choix de beaucoup de créateurs d’entreprise. Mais il ne faut pas occulter pour autant les différents statuts possibles, qui seront parfois plus adaptés.
Par exemple, beaucoup de créateurs d’entreprise bénéficiaires de l’allocation chômage optent plutôt pour la SASU. L’avantage, c’est que l’associé dirigeant de SASU n’a pas le statut de travailleur non salarié mais d’assimilé salarié, et ses cotisations sociales et impôt sont calculés sur sa rémunération. S’il ne se verse aucune rémunération, il n’a même pas de cotisation minimale.
Attention tout de même, pas de cotisations sociales, cela veut aussi dire : pas de droits en termes de protection sociale. Le statut de demandeur d’emploi offre une protection pour l’assurance maladie et permet de valider des trimestres pour la retraite, mais les droits peuvent être faibles au niveau des droits à la retraite ou des indemnités journalières, par exemple, là où un autoentrepreneur cumulerait les deux couvertures.
C’est donc une source d’optimisation possible, mais à considérer avec certaines précautions. Il faut toujours avoir en tête les contraintes et limites qui vont avec chaque option.
De quels revenus as-tu besoin ?
Avec ou sans aide, il est crucial de te demander comment tu vas financer ton quotidien si ton entreprise tarde à décoller. Évidemment, on souhaite toujours un développement rapide et des revenus suffisants pour simplement se lancer pleinement dans l’entrepreneuriat et en vivre confortablement. Mais ce n’est pas toujours la réalité du terrain malheureusement, et il vaut mieux s’y préparer un minimum, ne serait-ce que pour se laisser le temps de mettre les actions en place.
De combien d’argent as-tu besoin pour vivre ? L’allocation chômage sera-t-elle suffisante pour couvrir tes besoins financiers ? Dois-tu forcément compléter par des revenus issus de ton activité indépendante ? As-tu besoin de te rémunérer chaque mois ou peux-tu te contenter de dividendes qui seraient versés annuellement ?
La réponse à ces questions t’aidera à prendre des décisions en termes de forme juridique, régime fiscal, régime social, rémunération, etc.
Le chômage comme atout dans la création d’entreprise
L’allocation chômage peut représenter un énorme coup de pouce financier pour soutenir un projet de création d’entreprise, que ce soit avec le cumul de l’allocation chômage avec les revenus tirés de l’entreprise créée (cumul total ou partiel), ou avec l’ARCE pour profiter d’un capital de départ qui va aider à financer l’activité.
Mais au-delà de cet aspect purement financier, c’est aussi une période propice à la prise de recul.
Sortir du cadre professionnel habituel avec souvent un rythme effréné et avoir l’esprit plus disponible pour travailler sur le projet entrepreneurial. Car être au chômage, cela veut dire bénéficier de temps et ne plus avoir la charge mentale liée au travail salarié.
Cela veut aussi dire que pendant quelques mois, la pression financière est réduite puisque l’aide au retour à l’emploi finance au moins partiellement les besoins quotidiens.
Les demandeurs d’emploi peuvent aussi bénéficier de dispositifs d’accompagnement ou encore de financement de formation, pour développer plus facilement leur activité.
Ce qu’il faut retenir
Le chômage peut jouer un vrai rôle dans un projet entrepreneurial, tant pour la préparation ou la réalisation matérielle parce qu’il offre une période de disponibilité pour se consacrer pleinement à son projet de création d’entreprise, que pour l’aspect purement financier en apportant un soutien financier.
Pour en faire un véritable atout, il ne faut pas hésiter à préparer son projet, étudier les différentes hypothèses pour peser les avantages et inconvénients de chacune, et ainsi faire de vrais choix stratégiques.
L’erreur, ce serait surtout de ne pas se poser de questions alors qu’il y a une possibilité d’optimisation et qu’un projet planifié avec une vision au moins à moyen terme, c’est un projet qui aura beaucoup plus de chances de fonctionner. Une création d’entreprise, ça se prépare.
Il existe différents leviers d’optimisation, parmi lesquels on peut citer l’accès aux aides à la création d’entreprise (ACRE, ARCE…) ou encore le choix du statut juridique pour constituer une trésorerie importante dans son entreprise ou favoriser une certaine protection sociale.
Ce sont donc autant de critères à bien peser en amont pour que la période de chômage devienne un vrai tremplin vers l’entrepreneuriat.
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