Je t’ai parlé des dispositifs pour créer ton entreprise sans renoncer à ton job. Rappelle-toi, c’était ici pour le salarié du privé, ici pour le fonctionnaire, avec un focus sur la disponibilité ici. Voyons maintenant une option plus radicale : la démission.
« Au revoir, au revoir, président ! » ça te dit quelque chose ? Ahhh cette envie de tout plaquer. Adieu patron, adieu collègues (bon, ça tu n’es pas obligée, parfois on reste en contact avec ses anciens collègues quand même), adieu à cet emploi qui ne me convient pas ! Je démissionne.
Bon, il n’est pas recommandé de claquer la porte n’importe comment, surtout si c’est pour créer ta propre entreprise. Une démission, cela entraîne des conséquences qu’il vaut mieux mesurer avant de sauter le pas.
Je te propose quelques pistes pour faire mûrir ta réflexion et préparer ton éventuel départ. Ensuite, comme d’habitude nous aborderons l’aspect « paperasse » : concrètement, comment ça se passe d’un point de vue administratif, avec un focus sur le cas particulier du fonctionnaire.
Tu es prête ? C’est parti !
1 |Pourquoi une démission ?
Je pense que c’est une question primordiale. En principe, si on envisage sérieusement la démission, c’est qu’il y a un hic quelque part. Notre travail ne nous convient pas, la collaboration avec les collègues ou la hiérarchie se passe mal, nous avons besoin de voir autre chose, une reconversion ou un projet professionnel nous tient à cœur…
Bien que l’entrepreneuriat soit une merveilleuse aventure, parfois la solution à nos problèmes est simplement de changer d’entreprise ou de métier. En résumé, se lancer oui, mais pas pour de mauvaises raisons ni sans une certaine réflexion préalable.
Autant que possible, il faut s’assurer de pouvoir conserver une stabilité financière pendant de longs mois, le temps de retrouver un nouvel emploi ou de lancer son activité indépendante. Ne perdons pas de vue qu’il faut généralement un certain temps au jeune entrepreneur avant de pouvoir se rémunérer. L’idéal est de disposer d’économies assez confortables pour faire face au quotidien et aux imprévus qui ont le chic d’arriver au mauvais moment (sinon ce n’est pas drôle).
2 | L’allocation chômage
Tu auras peut-être droit à l’aide au retour à l’emploi (ARE), ce que l’on appelle couramment allocation chômage. La durée d’indemnisation dépend de la durée pendant laquelle tu as cotisé, avec généralement un maximum de 24 mois. Pour estimer le montant de cette aide, c’est par ici (simulateur de Pôle Emploi, au cas où le lien ne fonctionnerait pas). Parmi les conditions, il faut être privé d’emploi de façon involontaire. Autrement dit, la démission est en principe exclue du dispositif.
Toutefois, tu peux demander le réexamen de ton dossier, et peut-être obtenir le versement de l’ARE à partir du 5e mois de chômage. Il existe bien des cas de « démission légitime » qui permettent la prise en charge par Pôle Emploi sans attendre ce délai de 5 mois, mais il s’agit de situations particulières (déménagement pour suivre son conjoint ou enfant handicapé…).
Et si l’on est fonctionnaire ? Eh bien, théoriquement les conditions de prise en charge sont les mêmes. Je dis théoriquement car la mise en œuvre est complexe et peut générer des complications et délais de traitement à rallonge.
En effet, dans certains cas Pôle Emploi est le seul interlocuteur, mais dans d’autres cas il faut une coordination entre Pôle Emploi, où l’ex-fonctionnaire s’inscrit comme demandeur d’emploi, et son ancien employeur, qui a la charge du paiement de l’indemnisation. Autrement dit, si tu as un plan B, cela vaut mieux au cas où…
Remarque : La question de l’allocation chômage en cas de démission est en pleine négociation. Il sera désormais possible d’être indemnisé sans subir le délai de carence de 4 mois. Concrètement, les conditions sont si restrictives et lourdes que je doute de l’impact réel de cette mesure. Dans les grandes lignes, il faudra justifier de 5 ou 7 années ininterrompues d’activité et valider en commission un projet de reconversion incluant une formation. Au moment où j’écris ces lignes, la mesure n’est pas totalement actée, à suivre…
Tu as réfléchi, c’est sûr, tu démissionnes ? Voyons comment cela se passe d’un point de vue administratif.
3 | La démission d’un CDI (contrat à durée indéterminée)
Bonne nouvelle, tu es libre de partir quand tu veux, sans te justifier ! Enfin presque… tu dois quand même respecter un préavis. Sa durée est précisée dans le contrat de travail en général, sinon dans la convention collective ou accord collectif.
Si tu es enceinte ou jeune parent (jusqu’à 2 mois après la naissance de l’enfant ou à l’issue du congé maternité ou d’adoption), tu n’es pas obligé(e) d’effectuer le préavis. Dans ce cas, pense tout de même à envoyer ta lettre de démission en recommandé avec accusé de réception (LRAR) 15 jours avant la fin du congé.
Si tu es en congé pour création ou reprise d’entreprise, tu n’as pas non plus l’obligation d’effectuer ton préavis. Il faut par contre envoyer ta demande de démission au moins 3 mois avant la fin du congé.
Dans tous les cas, tu peux être dispensé de réaliser le préavis sur accord avec ton patron.
4 | La démission d’un CDD (contrat à durée déterminée)
Si tu es en CDD (contrat à durée déterminée), tu es bien plus limitée. Si tu justifies d’une embauche en CDI, tu dois simplement respecter un préavis calculé selon la durée de ton contrat ou la durée déjà effectuée, avec un maximum de 2 semaines.
Sinon, ta seule possibilité de démission dans les règles, c’est l’accord de ton employeur. Je te rassure, personne ne viendra t’enchaîner à ton travail, mais si tu pars sans être dans tes droits, cela s’appelle un abandon de poste.
C’est beaucoup moins bien pour ton CV et tu perds le versement de l’indemnité de précarité.
5 | Et le fonctionnaire alors ?
Là, c’est un petit peu plus compliqué. D’abord, tu demandes ta démission par lettre recommandée avec accusé de réception.
Oui, tu demandes, car votre administration peut dire oui ou non ! Quand on parle d’emploi à vie ce n’est pas une mince affaire…
Ensuite, ton administration doit te répondre. Pour cela, elle dispose d’un délai d’un mois… porté à 4 mois dans la fonction publique d’Etat.
Et si on te répond trop tard ? Ce n’est pas valable, il faut déposer une nouvelle demande.
Et si on ne te répond pas ? Une fois le délai expiré, tu peux déposer un recours devant le tribunal administratif. Oui, j’ai bien dit tribunal.
En cas de refus, tu peux te tourner vers la CAP (commission administrative paritaire). Et si tu obtiens l’accord de ton employeur… il n’y a pas de préavis fixé par loi, c’est lui qui décide de la date de ton départ.
Voilà voilà, tu sais tout, bon courage ! Cela peut très bien se passer et rapidement comme cela peut devenir un véritable périple de reprendre ta liberté. Encore une fois, personne ne viendra t’enchaîner à ton poste, mais c’est toujours mieux de démissionner en restant « bons amis » que de se faire licencier pour abandon de poste.
Ah, une dernière précision : l’administration conserve un droit de regard sur tes activités lucratives pendant 3 ans.
Tu restes tenue de l’informer de tes activités professionnelles 3 mois avant le début de celles-ci, et ne peux exercer qu’après avis de la commission de déontologie qui s’assure que tes nouvelles activités sont compatibles avec tes anciennes fonctions.
6 | Les bons plans
Je me suis étalée au sujet de la démission pour te recommander, si possible, de ne pas démissionner. Oui, tout ça pour ça.
Parce que j’ai mieux à te proposer : la rupture conventionnelle.
En bref, tu quittes ton job avec une indemnité au moins égale à ce qui te serait versé en cas de licenciement sans faute et tu as droit à l’allocation chômage dans les mêmes conditions que suite à licenciement.
Les modalités (préavis, indemnité,…) sont fixées librement par la convention que tu conclus avec ton patron. C’est pas mal, non ? Il ne reste plus qu’à négocier. Oui, je sais, yapluka, c’est facile à dire.
Pour finir, attention, chose rare, j’ai un bon plan pour le fonctionnaire aussi.
Connais-tu l’indemnité de départ volontaire (IDV) ? Si tu souhaites démissionner de la fonction publique, dans des cas très précis dont la création ou reprise d’entreprise, tu peux demander cette indemnité, qui peut aller jusqu’à deux ans de rémunération.
Tu es sur le point de démissionner ? en pleine réflexion ? Tu as franchi le pas ? Tes remarques, suggestions, témoignages sont les bienvenus en commentaire ! A bientôt !
Quelques articles qui peuvent t’intéresser :
– Les 5 étapes indispensables pour créer sa micro-entreprise
– Comment braver la peur de se lancer ?
– Micro-entreprise, est-ce vraiment une bonne idée ?
Bonjour,
Je suis professeur des écoles et je souhaite me reconvertir.
J’ai la possibilité de reprendre un bar/café en location-gérance avant de l’acheter.
J’ai plusieurs questions.
Puis-je prendre une disponibilité pour me lancer ? J’ai peur que ce ne soit pas une activité comptatible avec les principes de la fonction publique.
Si la disponibilité n’est pas possible, il me reste la démission. Mais je lis dans ton article que la commission de déontologie doit s’assurer que ma nouvelle activité est compatible avec mes anciennes fonctions. Peuvent-ils me refuser la reprise de ce bar ?
Merci pour vos éclaicissements
Hello Virginie,
L’Etat a effectivement un droit de regard sur les activités professionnelles d’un ancien fonctionnaire pendant les 3 ans suivant son départ. Cela dit, il faut que l’activité soit réellement incompatible avec ses anciennes fonctions pour que l’ancien employeur s’y oppose, ce refus doit être fondé et justifié. Cela peut être compliqué pour un cumul d’activité mais pour un départ en disponibilité ou démission, c’est plus souple car le but n’est pas non plus de t’empêcher de mener ta vie professionnelle et de subvenir à tes besoins !
Le seul moyen d’être fixée de manière certaine reste de déposer ta demande 🙂 Bon courage !